Le monde, une question de priorité

Depuis quelques semaines, le monde est secoué par une grave crise boursière ayant entrainé la faillite d’établissements financiers, précipité des fusions- acquisitions ainsi que la nationalisation d’autres et semé le doute dans le système. De l’avis même des experts, il n’y a pas eu pareil depuis 1929, crise ayant montré les limites des mécanismes du marché et leurs capacités à s’autoréguler. La finance mondiale est malmenée, le FMI est inquiet à travers les déclarations de Dominique Strauss Khan, Alan Greenspan non plus n’est pas rassurant ni d’ailleurs Ben Bernanke, le gotha du monde politique et financier souffle vraiment le chaud en imaginant les conséquences dans une économie réelle très mal au Etats-Unis et en Europe. Premières conséquences, le crédit devient rare avec le durcissement de ses conditions limitant son accès notamment aux PME, pourtant si nécessaires à la croissance et à l’emploi. Une crise de confiance s’installe et citoyen lambda confronté aux dures réalités quotidiennes s’interroge et cherche à comprendre par où passent les milliards de pertes découlant de logiques financières si complexes que même les habitués ont du mal à comprendre. Cette situation entraîne une crise de confiance réelle que le politique essaye de freiner par la communication pour rassurer le citoyen afin d’éviter le spectre de 1929 avec ses fils d’attentes devant les banques et il est aidé dans cet objectif par des banquiers centraux qui injectent des liquidités dans le système pour parer à leur rareté.

Sur les causes de cette débandade financière, il y a en ligne de mire, les prêts hypothécaires immobiliers qui ont fait parler d’eux l’été dernier, les fameux subprimes. Crédits conçus avec des logiques financières permettant aux citoyens de devenir propriétaire sans avoir la capacité réelle de rembourser, les banques oubliant ainsi toutes les logiques de prudence et par la titrisation les risques sont transférés à d’autres structures (fonds de pension, assurance…) moyennant gain. L’on peut juste rappeler que le prêt n’est pas fondé sur la capacité à rembourser et les taux sont variables dans le temps. Conséquence première, plusieurs ménages avec un changement de situation en terme de revenus se retrouvent insolvables et voient leur bien immobilier hypothéquer. Cette situation embarrasse aux Etats-Unis avec des banques en difficultés financières et au pays du libéralisme économique, l’Etat est appelé au secours du privé, il nationalise des banques, prête à des structures en difficulté, une très bonne leçon d’économie pour le monde. L’on se souviendra que l’été dernier, la BCE avait injecté plus de 200 milliards d’euros dans le circuit pour éviter l’enlisement de la zone et l’Etat étasunien prévoit un plan de près 700 milliards pour racheter les créances douteuses des banques qui seront gérées par une structure gouvernementale pour deux ans, idée inspirée du plan Reagan du début des années 80.

On parle de pragmatisme des autorités étatsuniennes, mot cachant tout le malaise des libéraux économiques face à cette crise dont les conséquences économiques sont loin d’être finies. Tout cela démontre les limites des mécanismes du marché et surtout celles de la libéralisation financière dont le crash boursier actuel est une des conséquences. Du jour au lendemain des milliards de dollars ont été injectés, sommes d’argent inimaginables en comparaison à celles nécessaires aux Objectifs du Développement du Millénaire dont l’atteinte permettrait à près de trois milliards d’Hommes d’avoir accès à l’eau, à la santé, à l’éducation…bref aux conditions pour une vie digne. Oui, le monde est une question de priorité politique et ce, quelle que soit l’échelle territoriale. Avec la crise, l’objectif est de sauver le système financier international, d’éviter la panique et restaurer la confiance car, une fois de plus l’économie de marché repose sur la confiance. Ce système économique, pour être efficace a besoin de règles et d’éthique aujourd’hui. La confiance est primordiale car, c’est elle qui fait que des acteurs économiques échangent et c’est elle aussi par exemple qui fait défaut dans les pays en développement et principalement en Afrique. Oui la confiance indispensable chez les individus permettant de pérenniser leurs relations l’est aussi entre le citoyen et les institutions. C’est l’une des leçons à tirer de cette crise financière et toutes les sorties médiatiques des politiques ont pour objectif de restaurer ce lien. Cette dimension est le plus souvent reléguée au second plan par le politique en Afrique or elle est essentielle dans la relation entre gouvernants et gouvernés et indispensable à l’économie de marché. Oui aujourd’hui, on se rend une fois de plus compte que l’efficacité des marchés passe par de l’intervention publique qui doit édicter ses règles de fonctionnement et se donner les moyens de le contrôler pour que la valeur ajoutée produite par le biais de redistribution serve à l’ensemble de l’économie.

Cette crise devrait faire réfléchir les politiques dans les pays en développement sur le libéralisme économique, sur la relation entre L’Etat et acteurs privés et non chercher à appliquer de facto les cours reçus en première année de faculté sur l’économie de marché. La concurrence ne devrait être un objectif ultime mais un moyen et l’économie doit être au service de la justice sociale. A travers cette crise, on se rend compte une fois de plus que la puissance publique doit avoir pour rôle de réguler les marchés financiers ainsi que tous les autres pour que la richesse produite serve à l’amélioration des conditions de vie pour permettre à chacun à tous d’avoir accès aux services sociaux permettant d’accroitre ses capacités à participer pleinement à la vie collective. Cette crise nous interroge sur le rôle et la place des acteurs dans l’économie, sur leurs interactions mais aussi sur la finalité du système productif tel qu’il fonctionne aujourd’hui. Pour terminer, nous dirons simplement qu’il n’est jamais assez de nos jours de relire Keynes et ses successeurs comme Stiglitz.

Commentaires

Olá, goût très du Blogue.
Excuse ne pas écrire plus, mais mon français n'est pas bon.
Une accolade depuis le Portugal

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