Paix et accès à l’eau : éléments indissociables

L’eau, enjeu majeur pour ce siècle nouveau, tel pourrait être le titre des nombreuses publications dans ce domaine. Inutile de rappeler que si l’eau est source de vie pour de milliards d’êtres vivants, de part sa raréfaction et/ou sa mauvaise qualité, elle peut se révéler source de la mort. Encore de nos jours, et ce malgré la décennie des années 80, proclamée celle de l’eau, les statistiques dans ce domaine restent encore effroyables avec plus d’un milliard de personnes n’ayant pas accès à cette ressource ainsi qu’à des services d’assainissement adéquats. Il y a nécessité d’agir pour l’ensemble de la communauté internationale car une fois de plus échouer dans l’accès à l’eau et à la mise en place de véritables services d’assainissement notamment dans les pays en développement mettraient ou mettent déjà en péril nombre d’efforts en matière de réduction de la pauvreté. Cette nécessité se trouve aujourd’hui accentuée par les différents contraintes réelles qui pèsent sur les ressources hydriques au nombre des quels figurent bien évidemment le changement climatique et la démographie accompagnée d’une urbanisation galopante. Cela rend aigu les problèmes politiques posés par le partage des eaux, car cette ressource dans maintes régions du monde, facteur d’unité est devenue un enjeu stratégique majeur, une arme politique importante…bref l’eau devient davantage source de conflits entre Etats mais aussi au sein des Etats même si, son caractère d’élément de coopération reste largement d’actualité et dirai-je heureusement.

L’eau est à la base de nombre de coopérations interétatiques par l’existence de plusieurs organisations intergouvernementales autour de la gestion des ressources hydriques dont l’objectif est d’assurer avant tout le dialogue entre différents partenaires sur le partage et la gestion d’une même source puisqu’un un fleuve partagé est à la fois un espace commun regorgeant donc de ressources communes, mais pouvant aussi être terreau d’antagonismes conduisant à l’expression et à l’exercice de la force. S’il y a un domaine actuellement où il existe de multitudes coopérations interétatiques symbolisées par des accords, c’est bien évidemment celui de l’eau. Il est clair que toutes ces organisations jouent un rôle majeur dans le partage et la préservation des ressources hydriques à l’échelle globale. Elles ont plutôt été le lieu où le dialogue a primé sur l’expression de la logique de la force permettant ainsi le partage plus ou moins acceptable des bassins fluviaux. Des tentatives de légifération dans le domaine de l’eau à l’échelle globale ne manquent pas mais force est de reconnaître que la gouvernance internationale dans ce domaine reste encore balbutiante. C’est cette gouvernance aujourd’hui qu’il faudrait renforcer tant les enjeux (économiques, écologiques, sociaux et politiques) sont importants. Nombre d’institutions tant publiques que privées travaillent pour fournir de l’expertise scientifique et technique ainsi que des moyens financiers dans le domaine et assister les pays les plus « pauvres » notamment dans l’élaboration et la mise en œuvre de leurs stratégies et politiques dans le domaine de l’eau, chose qui ne peut être que salutaire.

Il y a aujourd’hui tentatives de codification en matière de gestion des eaux globales mais elles sont encore très limitées par manque d’harmonisation d’où la nécessité de la création d’un cadre commun où se définiraient notamment les principes et logiques d’action d’ensemble et qui seraient ensuite déclinés en fonction des territoires et des spécificités liées à la gestions des eaux partagées. Ce cadre commun pourrait se matérialiser par la mise sur pied d’une Organisation Mondiale de l’Environnement où seraient discutées les questions liées à la gestion des eaux partagées, car l’eau est aussi un bien environnemental, en plus d’être un bien économique et social Toujours est il qu’il y a une urgence dans l’établissement d’une véritable gouvernance des ressources hydriques tant à l’échelle internationale que nationale car si on regarde bien les véritables « guerres de l’eau » se passent déjà au niveau des Etats où la rareté dans certains cas accentue les difficultés d’arbitrages entre différentes catégories d’acteurs (agriculteurs, industriels, citoyens…). C’est la toute la difficulté de la cohérence des politiques d’eau dans le temps où à un moment donnée les priorités changent faisant donc évoluer les équilibres antérieurs. Nul ne saurait ignorer de nos jours le caractère vital des ressources hydriques partagées et il indéniable que l’accès à l’eau et à un service d’assainissement adéquat sont facteur de paix dans plusieurs régions du monde. Garantir de l’eau est un des éléments fondamentaux de l’instauration d’une paix durable et lutter contre la pauvreté comme au Moyen Orient ou Afrique du Nord. Cela reste aussi valable dans des régions plus ou moins bien irriguées comme en Afrique de l’Ouest mais où les politiques font défaut et où en tout cas, les résultats en matière d’adduction d’eau et d’assainissement restent largement en deçà au regard des potentialités (Guinée, Côte d’Ivoire...).

Ce n’est pas anodin si l’accès à l’eau et à l’assainissement est un des objectifs de développement du millénaire. Certes l’eau dans l’histoire de l’humanité a été très souvent le point de rencontre de belles civilisations, un élément de coopération entre différents Etats mais les contraintes qui pèsent sur elle actuellement appellent à revoir nos logiques d’action pour mieux l’utiliser et la préserver. Cela passera inévitablement par l’amélioration des techniques permettant de meilleurs usages de l’eau notamment celles agricoles (responsable en moyenne des 2/3 des prélèvements) où le potentiel d’économies reste étendu. L’innovation en matière institutionnelle reste l’autre piste sérieuse par la mise en place de nouveaux systèmes de gouvernance où les acteurs seront au cœur de la définition et de la mise en œuvre des politiques le tout s’inscrivant dans une véritable logique de changement des orientations antérieures. L’eau est une ressource vitale d’où tout l’intérêt pour l’humanité entière de trouver les voies et moyens de mieux l’utiliser et la préserver en faisant preuve de réalisme, de clairvoyance et de volonté. C’est l’un des défis majeurs auquel il est impératif de s’attaquer et surtout de réussir car in fine, c’est tout simplement la survie de l’espèce humaine qui en dépend.

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