Encore un cap tristement franchi

Le 28 septembre 2009 restera mémorable dans l’histoire contemporaine de la Guinée avec le massacre d’une population civile par sa propre armée et qui, portant est sensée la défendre. Ceci s’est passé au stade du 28 septembre, un endroit donc clos. De l’avis des observateurs, un cap a été tristement franchi avec la violation de l’un des droits les plus sacrés de l’individu, le droit à la vie. Comment expliquer et surtout comprendre de telles haines vis-à-vis de citoyens non armés dont le seul tord restera à jamais d’avoir voulu s’exprimer? Ce 28 septembre 2009 donne raison de plus à tous ceux qui de par le monde ont toujours douté de la volonté des nouvelles autorités de s’inscrire sur le chemin de la démocratie. Et pourtant, il y a juste quelques mois, leur arrivée avait suscité espoir et crée l’adhésion sous contraintes du respect du discours bien évidemment. La démocratie est une mode de gestion collective, un système à l’échelle d’une entité territoriale où le droit à l’expression est reconnu et respecté à fortiori celui de vivre. Que de frasques, de violences, de rêves qui s’interrompent brusquement pour ce pays qui aurait dû devenir un havre de paix et de prospérité. Voilà encore un des épisodes de notre révolution inachevée commencée il y a une cinquantaine d'années. Il est certain qu'après cette tragédie, ce pays se cherche encore et toujours. Que valent toutes ses aspirations individuelles et collectives de défense d’intérêts propres des nouvelles autorités face à tous ces blessés, humiliés et morts ?

L’histoire nous a néanmoins appris que la sauvegarde du pouvoir peut entraîner d’énormes détestables choses, mais cela n’implique nullement d’en faire si souvent de passages obligés trainant leurs corvées de souffrances, de malheurs et de désespérance. L’histoire, les expériences d’ailleurs devraient servir aussi de leçons, de creuset pour mieux penser, concevoir et bâtir l’avenir. Encore et comme maintes fois dans son histoire, ce pays est confronté à des choix cruciaux: s’inscrire durablement sur le chemin de la démocratie et la prospérité ou sombrer tout simplement. C'est dur à admettre, triste à entendre mais bien réel. Même les mieux avertis n’auraient jamais pensé à de telles atrocités. Mais encore, tragiquement, l’histoire a montré qu’elle avait une issue incertaine. Rien ne saurait pris pour acquis tant les embûches existent que seul la raison peut faire éviter. J’ose espérer quand même que celle ci triomphera pour au moins à la mémoire de tous ceux qui sont tombés depuis sur cette terre et au-delà dans cette lutte inlassable pour la liberté et une vie digne. Quand ce peuple verra le bout du tunnel ? Je n’en sais pas grand-chose, mais suis convaincu que personne ne peut s’opposer durablement à la volonté populaire. Les temps changent, cette évolution appelle de notre part une perpétuelle remise en question dans nos façons de penser, de faire et de vivre ensemble. Ceci, nous ne pourrons éternellement faire économie au risque d’arriver toujours avec un ou des pas en retard et ainsi se retrouver toujours du mauvais côté de l’histoire. Comme c’est le cas en ce moment, le moins que l’on puisse dire objectivement. Alors que tant de défis nous attendent. il suffit juste de voir chez nous et autour pour s'en rendre compte de la nécessité de changer.

A chaque époque ses réalités, ses exigences, ses défis et aspirations des peuples. On ne peut gouverner de nos jours avec des logiques du passé. Nos modes de gestion collective doivent être en phase avec les réalités de l’époque, au risque de nous embourber pour longtemps encore. L’essentiel de nos jours ne saurait être de conquérir le pouvoir mais surtout de le mettre au service d’une vision, voire d’un idéal clair et partagé. Ce pays aspire aussi au bonheur à l’image de tant, et cela ne sera possible qu’en fédérant l’énergie de tous ses enfants, en se forgeant de véritables modes de gestion collective dans lesquelles chacun de nous se reconnaîtra, gage de son implication à l’œuvre collective. Le monde s’indigne encore du degré de violence de ce 28 septembre 2009 et à vrai dire, il y a de quoi, rien qu’en voyant les images de ces battus, blessés, tués et le comble avec ces femmes atteintes dans leur dignité. Dans nos sociétés où la femme tant dans son corps que son esprit reste un être respecté, il y a vraiment de quoi nous faire réfléchir. Jamais, en tout cas, en public de pareilles choses n’ont été commises. Le chemin de la liberté sera long et périlleux, en témoigne ce tristement 28 septembre que nul ne peut souhaiter se reproduire. Il est plus que jamais nécessaire de rester mobilisés pour l’instauration de la démocratie en Guinée. A quand notre réveil interne ? A quand arrêtera t-on de toujours voir le diable chez l’autre alors qu’il est juste près ? Est-ce cela notre idéal au 21e siècle ? Certainement non, preuve par cette mobilisation et une « politisation » de plus en plus importante de nos concitoyens A quand alors pour doter ce pays d’institutions fortes capables de nous rassembler autours d'un idéal et d’objectifs partagés pour recommencer à espérer et avoir foi en l’avenir. A tous ceux qui nous ont quittés sans savoir vraiment pourquoi, que leurs âmes reposent en paix.

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