L’arnaque des banques en Guinée

Venir en France reste un objectif pour des étudiants et bacheliers guinéens pour poursuivre leur projet d’études et depuis 1999, la coopération française a mis en place un dispositif institutionnel aux futurs candidats permettant de mener un ensemble de démarches à cet effet. Aujourd’hui force est de constater que de plus en plus de guinéens étudient en France, et ce, dans nombre de domaines même si, les sciences sociales ont tendance à prendre le pas. Ce constat ne peut que réjouir dans un monde où les possibilités de la création de la valeur ajoutée se situent dans l’acquisition de compétences et à un moment où les pays développés rivalisent de dispositifs pour attirer des étudiants d’ailleurs. Etudier en France pour nous autres venant de la Guinée reste un atout important tenant compte à la fois de la qualité des services fournies mais aussi de leurs coûts comparativement à d’autres pays développés à l’image des Etats-Unis et du Canada. L’on pourrait dire que c’est tout bénef. Cela étant dit, l’évolution des choses peut aussi faire ressortir un durcissement des conditions d’admission dans les universités françaises intégrant le niveau de formation, les capacités financières à se prendre en charge ainsi que le projet professionnel dans l’ensemble. En France mais pas spécifiquement, les étudiants guinéens comme d’autres d’ailleurs financent leurs études en travaillant avec des conditions d’accès à l’emploi très disparates selon où l’on se trouve dans le pays reflétant la dynamique économique sur le territoire national. S’il est de plus en plus difficile d’avoir accès à un emploi estudiantin dans un contexte de crise économique générale, l’on comprend aisément toutes les difficultés que peuvent avoir ceux qui viennent d’arriver pour décrocher le précieux sésame afin d’assurer correctement leurs études la première année, une année cruciale à l’intégration dans la société d’accueil et la poursuite des objectifs initiaux.

Inutile de rappeler qu’il est aujourd’hui expressément demandé à tout candidat d’ouvrir un compte bancaire au pays et y domicilier une somme de près de 7 000 euros pour un virement mensuel de l’ordre de 530 euros. Il y a quelques jours, j’ai rencontré des étudiants dans une ville très guinéenne qui bien qu’ayant satisfait à ces conditions ne reçoivent qu’irrégulièrement leur s avoirs. Ce qui, les met on peut l’imaginer dans des conditions très inconfortables alors qu’au passage les banques en guinée fructifient leurs dépôts. Apparaissent quelque temps après leur arrivée des difficultés à faire face au quotidien les conduisant à réfléchir sur comment s’en sortir plutôt que de se concentrer sur leurs études déjà difficiles même en temps normal. L’on ne peut que déplorer cette façon de faire très irresponsable de la part de ces institutions financières. A la question de savoir pourquoi votre argent n’arrive pas, la réponse qui m’a été apportée est que la personne qui s’en occupe est en mission. Cela montre une fois de plus les difficultés de ces acteurs à honorer leurs engagements et à s’inscrire dans une dynamique de changement à la quelle nous aspirons tous pour ce pays.

Cette question d’une gestion normale d’avoirs bancaires de ces étudiants dont on peut imaginer les difficultés pour nombre de familles à réunir la somme indiquée dans un contexte de crise économique aigue est devenue un vrai business au sens bad du terme pour ces établissements financiers. Actuellement, un étudiant paie plus de 600 euros de frais essentiellement de virement entre la Guinée et la France pour douze mois sachant qu’à l’avance ces sommes déposées ont été placées et génèrent des intérêts. Vous me direz, c’est dans la logique des choses, certes, mais à vouloir trop y gagner on pervertit le système et l’actuelle crise financière en est un exemple. Le calcul vite fait ramène à un coût d’un virement mensuel de plus de 50 euros. Vous me direz aussi que cette somme est inférieure à l’intermédiation d’une institution de transfert d’argent, certes, mais à la différence notable que cette dernière n’est pas une institution de dépôt. Il est temps pour les autorités de chercher à voir de plus près dans ces circuits financiers mais bon j’imagine qu’elles ont d’autres « chats à fouetter », donc il appartient aux citoyens et grâce aux média (virtuels ou pas) d’alerter sur ses agissements irresponsables en dénonçant ces pratiques et d’exiger un respect des contrats signés pour permettre à ces guinéens de mener à bien leurs projets d’études pour doter notre pays de compétences indispensables à son développement. Par ce message j’invite toutes les structures associatives Guinéennes et principalement estudiantines à s’intéresser à cette question car elles se battent au quotidien pour aider et accompagner la communauté à mieux s’intégrer dans le pays d’accueil. Il y a vraiment lieu aujourd’hui de repenser ce mécanisme et d’exiger sa transparence en luttant contre l’asymétrie d’information.

Il nous appartient à tous au quotidien de faire preuve davantage de responsabilité pour contribuer au changement dont ce pays a besoin et chercher à stopper l’inversion de nos valeurs sociales sources de nos difficultés socioéconomiques. Cette évolution dans le monde professionnel reste une nécessité pour permettre à chacun là où il se trouve d’être utile à soi mais aussi aux autres. C’est l’essence même du développement combinant à la fois des changements individuels et collectifs dans un socle de valeurs admises et partagées. Le respect du contrat et des obligations est une nécessité dans la création de la valeur et à l’instauration d’une relation de confiance entre acteurs économiques. Le système économique dans lequel nous sommes plongés ne peut être efficace que dans la transparence permettant de réduire l’asymétrie de l’information entre acteurs contractants et c’est toute l’importance pour la puissance publique d’être à l’avant-garde la production des normes juridiques. Aujourd’hui, l’on se plaint souvent de l’état de notre système mais comment s’étonner de ses défaillances par son incapacité à produire du progrès pour tous à partir du moment où nous avons une dégradation et une inversion de nos valeurs. Cette dimension éthique devrait être prégnante dans l’économie de marché car l’essentiel de ses problèmes viennent le plus souvent de l’écart qui existe entre les aspirations des acteurs individuels et collectifs et ce qui est acceptable par la société à un moment donné et les crises du capitalisme en sont une illustration dans le temps de cette dichotomie.

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